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Les "Histoires de Jacques" -20-
Baptême
de l'air de Jean Thibaudeau.
Paleolithicien
charentais, autodidacte, ancien "laboureur à bœufs".
Dans les années
soixante, habitant en région parisienne, je profitais de tous les longs
week-ends et des vacances pour venir me ressourcer à Gémozac, en Charente
Matritime, dans la maison de famille de mon épouse. J'y avais un vieil
ami, Jean Thibaudeau, propriétaire du Moulin des Parpaillons et je prenais
toujours grand plaisir à lui rendre visite pour de longues discussions
archéologique et même philosophiques. C'était un de ces
paysans charentais, cultivateur, issu d'une longue lignée de meuniers et fier
de se qualifier "d'ancien laboureur à bœufs" !
Grand observateur,
il avait remarqué dans ses champs nombre de silex aux formes régulières…
Curieux, il s'informa, se mit à étudier l'archéologie et devint au fil des ans un paléolithicien
réputé et confirmé. Parfois, il m'arrivait de l'aider
photographiquement pour ses publications. Pilote de tourisme, je faisais
beaucoup de recherches archéologiques aériennes, au départ de l'aéroclub de
Pons. Au cours des
vacances 1967, par une radieuse matinée de Juillet, j'avais proposé à Jean
Thibaudeau de l'emmener avec moi, au cours d'une mission à caractère très
local, fort susceptible de l'intéresser puisque nous survolerions l'anticlinal
de Saintonge et ses zones de prospections favorites.
Le Jodel DR400-125 de notre promenade.
Arrivés à Pons, ses
étonnements ne faisaient que commencer : "mais ça n'est que de la toile,
votre engin...". La sortie du hangar, le plein de carburant, les
vérifications pré-vol, l'installation à bord, la radio, tout était nouvelle
découverte. L'avion était pour lui un univers étrange, très mécanique, voire
presque hostile et je le sentais fortement tendu.
Mais déjà les
images affluaient : Pons, sur son éperon rocheux, dominant la Seudre de toute
la hauteur de son donjon. Tout de suite, à la sortie de la ville, il
reconnaissait le val de Soute et ses lieux favoris: les Chartres, Soute,
Souillac etc
Nous avions
continué par la rive droite de la Gironde, par Meschers et Saint-Georges
jusqu'à Royan. Et Thibaudeau, enthousiaste cette fois, ponctuait ses phrases de
nombreuses exclamations où le mot "merveilleux" revenait souvent...
Il comparait cet estuaire aux autres grands estuaires du monde et le Gange y
figurait... Puis il fallut
rentrer, et cette campagne inconnue pour lui, car au-delà du rayon d'action de
son vélo, le surprenait un peu. Pourtant, lorsque je lui avais montré le donjon
de Pons, à l'horizon, tout était rentré dans l'ordre : il s'était reconnu,
situé, localisé !
Un atterrissage doux et, au parking, lorsque l'hélice se matérialisa brusquement, figée devant notre nez, il resta assis, immobile, silencieux, concentré sur ces vagues d'images qui venaient de le submerger... Dans la voiture, en rentrant, sa faconde revint, avec une explosion de commentaires. Oui, ce jour-là, je crois lui avoir fait vraiment plaisir, et il avait manifestement engrangé beaucoup d'excellents souvenirs... De quand cela date-t-il ? Oh, d'à peine plus d'un demi-siècle...
Comme le temps passe !
Jacques
DASSIÉ
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